Au Coin du Tricar

Werner II Tricars motos voiturettes



La Motocyclette Werner. En-tête d'une lettre Werner 1904
 
Les tricars Werner

Avec leurs tricars de 1904 et 1905, les frères Werner étaient les pionniers en France en ce qui concerne l'utilisation d'un châssis-tricar portant un "cadre de moto adapté" (voir Typologie des tricars). Ce mode de construction qui fut emprunté aux tricars anglais (p. ex. Ariel) deviendra par la suite standard sur la plupart des tricars français. En 1906, la marque était aussi la première à offrir une tri-voiturette à sa clientèle. Cette avance sur la concurrence française n'est pas étonnante, puisque les Werner se tournèrent vers la construction de tricars à pétition de leur maison anglaise et ils connaissaient parfaitement le marché britannique.

L'histoire des tricars Werner commence en Angleterre en 1902, l'année de l'apparition de la nouvelle motocyclette 1 CV ¾ dont le cadre était idéal pour une utilisation avec un avant-train.
C'était John J. Leonard, agent Werner de longue date ("huit [!] années avec Werner Frères"), qui avait l'idée de combiner une Werner modèle 1902 avec un avant-train léger pour bicyclettes de sa propre construction.  

publicité 1902 pour l'avant-train John J. Leonard, Brockley Grove, London 
 
"The Leonard avant-train" (notez la désignation française au lieu du mot anglais "forecarriage") est muni d'une direction à essieu brisé et d'un simple fauteuil en osier. Cet avant-train est encore pensé pour un usage occasionnel ("en été ou en hiver"), parce qu'il est facile à mettre et à enlever. Il suffit d'enlever la roue avant de la moto et de boulonner l'avant-train sur la partie avant du cadre. La fourche est conservée, mais comme dans la plupart des cas, retournée. Ensuite, il fallait corriger la position du guidon. Le prix de l'avant-train complet avec garde-boues et supports pour lampes est de £ 11, 11 shillings (environ 300 francs de l'époque). 

tricar Werner avec avant-train Leonard, 1902

26. Stanley Show, Royal Agricultural Hall, Islington (London), 2.-29. novembre 1902.
 
Werner, tricar et motocyclettes au stand de l'entreprise, Stanley Cycle Show Islington 1902
Le tricar à avant-train Leonard ainsi que dix motocyclettes ont été présentés
au stand numéro 91 lors du Stanley Cycle Show 1902.


La Motorette 1903

Le tricar à avant-train amovible fut vite développé par Werner Motors, et en 1903, "après beaucoup de mois d'études pratiques", fut présentée la "Motorette" Werner.
 
réclame pour la Motorette Werner 1903, Angelterre

La base de ce tricar est un modèle par ailleurs inconnu, une 3 HP ¼ baptisé "Paris-Madrid", d'après la course du même nom qui fut remportée par Auguste Bucquet sur Werner 3 CV ½ le 25 mai 1903.
 
Auguste Bucquet, vainqueur de Paris-Madrid 1903 sur moto Werner

Au cadre de la moto type Paris-Madrid, qui ne fut apparemment pas modifié, a été boulonné un châssis-tricar ayant deux longerons latéraux fixés sur l'axe de la roue arrière ("fixed to the motorcycle by means of stays taken right through to the axle of the back wheel"). Également en 1903, Werner Motors Ltd offre aussi un avant-train (forecarriage) amovible pour 15 — 20 £.
En 1904 apparaît un nouveau modèle de la Motorette qui sera aussi présenté au Salon de Paris. Ce modèle est déjà muni du moteur à deux cylindres verticaux qui équipera tous les tricars de la marque ainsi que les motocyclettes à partir de 1905.
 
Les moteurs
 
Afin d'éviter des répétitions, nous présentons d'abord le moteur bicylindre qui a mû à partir de 1904 tous les tricars et tri-voiturettes Werner, soit dans sa version refroidie à ailettes (seulement en 1904), soit dans sa version refroidie à eau. Il convient d'examiner dans ce contexte aussi le monocylindre de 3 HP ¼ à soupapes commandées dont la conception est similaire, bien que ce moteur n'ait propulsé que des motocyclettes en 1904. Cependant, tout laisse supposer que les deux moteurs ont été conçus ensemble et que le bicylindre était d'abord destiné aux tricars et le monocylindre aux motocyclettes, mais le premier a remplacé ensuite le monocylindre aussi sur les motos.
 
Mis à part leur puissance plus grande, les moteurs des tricars ont la même architecture que le bicylindre de 3 HP ¼ apparu en 1905 pour motos.
 
Photos du moteur Werner à deux cylindres, 1905
 
Le vilebrequin du bicylindre, comme d'habitude à l'époque, n'est que monté sur les deux coussinets des semi-carters, qui s'ouvrent dans le plan de joint vertical. Les cylindres à ailettes sont isolés mais venus de fonderie jumelés par la culasse qui n'est pas détachable. Les soupapes d'admission sont automatiques, celles d'échappement sont commandées. Le choix d'un bicylindre en ligne a entraîné l'utilisation d'un arbre à cames qui est disposé en parallèle au vilebrequin et qui est placé à côté des cylindres dans un logement dans le carter moteur en forme de tunnel. L'arbre à cames est entraîné dès le vilebrequin par une cascade successive de trois pignons, dont celui fixé sur l'arbre à cames porte la came commandant les deux trembleurs de l'allumage. Cette même architecture fut aussi employée pour le monocylindre à soupapes latérales : 
 
Le moteur Werner monocylindre, 1904
Le monocylindre Werner 3 HP ¼ à soupapes commandées (1904)À gauche : le couvercle (R) de la distribution par trois pignons et la boîte d'allumage (G). Sur le bicylindre, l'allumage se fait par deux trembleurs et le contour de la boîte prend la forme d'un U. À droite : l'image montre la disposition des soupapes commandées par un arbre à cames latéral. Sur son extrémité gauche se trouve la boîte d'allumage. De l'autre côté est visible une trappe (T) qui permet de visiter l'arbre à cames. Sur les modèles à allumage par magnéto, on y trouve un pignon monté sur l'arbre à cames qui entraîne la magnéto par chaîne. 

Sur un monocylindre, cette solution est peu fréquente, mais on la trouve p. ex. sur le moteur Bruneau 3 HP qui est cependant à soupape d'admission automatique.
 
moteur Bruneau 1905
Moteur Bruneau 3 HP
 
Au lieu d'opter pour une distribution dans un carter de distribution disposé sur la face frontale du moteur Werner, on a tourné le cylindre de 90º pour aligner les soupapes avec un arbre à cames latéral. Eugène Werner, le directeur technique, a choisi apparemment cette "conception modulaire" pour épargner les coûts de développement d'un monocylindre classique à soupapes latérales et distribution sur le front du carter. Sur la moto Werner, la boîte à soupapes se trouve en avant du cylindre, dans le courant de l'air. La disposition de la boîte à soupapes sur le moteur Bruneau est moins favorable, car elle se trouve derrière le cylindre. Ce désavantage est néanmoins plus que compensé par le fait que la culasse est refroidie par eau.
Pour des raisons de construction les colonnes d'assemblage caractéristiques du monocylindre ont été abandonnées sur le bicylindre. La base de chaque cylindre est boulonnée sur le carter.
 
deux moteurs bicylindre: Werner 1905 et Rochet 1907
Bicylindre Werner (1906) et bicyclindre Bruneau-Rochet (moto type MG, 1907).
 
Les photos ci-dessus permettent de se faire une idée de la construction très compacte du bicylindre Werner en comparaison avec le bicylindre Rochet contemporain, qui utilise une architecture similaire. Le carter moteur du bicylindre Werner est à peine plus large que celui du monocylindre, ce qui permet de conserver le mode de construction typique d'un monocylindre avec deux semi-carters s'ouvrant dans le plan de joint vertical. À la différence aussi du monocylindre Bruneau 3 HP déjà mentionné, le carter du bicylindre Bruneau / Rochet s'ouvre dans le plan de joint horizontal, la construction typique des moteurs multicylindres. La largeur réduite du bicylindre Werner oblige toutefois à monter des soupapes d'admission automatiques, ce qui constitue un pas en arrière par rapport au monocylindre (au moins d'un point de vue moderne).
À en croire la publicité Werner, le bicylindre a été choisi, parce qu'il travaille presque sans vibrations. On peut donc conclure que le vilebrequin est calé à 180º pour compenser les forces d'inertie du premier ordre. C'est le mode de construction le plus répandu déjà à l'époque ; le fait que le calage à 180º entraîne un écart d'allumage inégal des deux cylindres (180º et ensuite 540º) est de moindre importance.
 
À partir de 1905, le moteur du tricar est refroidi à eau.
 
moteur Werner refroidi à eau, 1905
 
On reconnaît sur les images agrandies que le tube qui amène l'eau venant du radiateur n'est pas connecté à la région inférieure du cylindre, mais à la zone de la boîte à soupapes. Ce sont donc seulement la culasse avec la boîte à soupapes qui est refroidie par l'eau. Cette zone correspond exactement à la zone ailettée de la version refroidie à air de ce bicylindre.

La Motorette ("Pétrolette") Werner 3 HP ½ 1904

Ce tricar est connu par un article apparu dans la Revue du Touring-Club de France (décembre 1904), qui, malheureusement, ne présente aucune photo de l'engin. L'auteur, Jacques Ballif (le fils du président du TCF, Abel Ballif) donne une description de la "Pétrolette Werner" et la classe parmi les rares tricars français du moment qui sont à la hauteur de la production anglaise. S'il n'y avait pas une confusion du nom Motorette avec peut-être celui de la Pétrolette Omega, "Pétrolette" était la dénomination commerciale du tricar en France. (vers la description de la "Petrolette" par Ballif.)
Ce tricar disposait d'un "châssis spécial" suspendu en avant par des ressorts à lames. À en juger par la Motorette 1903, l'expression "châssis spécial" désigne un châssis-tricar, dont la construction était très probablement similaire à celle des tricars Werner photographiés par Jules Beau au Critérium de 1905 (voir plus loin). Les différences auront porté surtout sur la mécanique : la Pétrolette présentée au Salon avait un bicylindre à ailettes de 3 ½ HP qui était monté transversal au sens de la marche, comme sur une voiture. Le vilebrequin, qui était disposé dans le sens longitudinal, portait à son extrémité une vis sans fin engrenant avec un pignon dont l'axe était perpendiculaire à celui du moteur. Disposés symétriquement à droite et à gauche de l'appareil étaient les deux mécanismes de l'embrayage et de la transmission dont chacun comprenait un plateau d'embrayage entraîné par l'axe du pignon déjà mentionné, une pédale, un cône garni de cuir, une roue dentée, une chaîne et un pignon libre monté sur la roue arrière. La mise en marche du moteur se faisait à la toupie. Comme on voit, cette disposition de la mécanique est trop différente de celle de la motocyclette 3 HP ¼ contemporaine pour laisser penser que celle-ci aurait servi comme base d'un tricar à châssis-tricar. Le moteur 3 HP ½ du tricar est sans doute une version un peu plus puissante du bicylindre de 3 HP ¼ (55 x 76 mm, soit 361 cm³) de la moto Werner.
Le tricar était équipé de deux freins dont l'un agissait sur la jante de la roue arrière et l'autre était à tambour (frein à sangle).
 
Le tricar 5 HP 1905

tricar Werner 1905

Le tricar Werner 5 HP de 1905 fit son apparition en compétition lors du Critérium des tricars en septembre 1905. Sur les photos existantes, on reconnaît bien le châssis tubulaire dont la construction ressemble celle d'un châssis-tricar adaptable au cadre d'une moto, mais le tricar Werner 1905, comme son prédécesseur, est un tricar à part entière. 
 
tricars Werner 1905, Bauduret et Bonnard au concours des tricars
1905, Concours des tricars, l'équipe Werner: Bauduret (nº 23) et Paul Bonnard (nº 8 )

Bonnard sur tricar Werner 1905

1905 concours des tricars, tricar Werner
Briand sur tricar Werner, septembre 1905
 
L'avant-train est relié aussi à la fourche arrière du cadre central au moyen de deux longerons à gauche et à droite du cadre. La stabilité latérale est assurée par deux paires de haubans seulement au lieu de quatre, qui relient les longerons latéraux à la partie inférieure du tube de direction. 
cadre de motocyclette Werner 1904Par rapport à la moto Werner, le cadre a été prolongé, de sorte que le moteur n'est plus fixé directement au tube de selle, comme sur la moto Werner, mais plus en avant, à un tube horizontal portant le tube de selle. Une traverse transversale renforce la suspension arrière du motor, qui, en avant, est fixé au tube oblique du cadre.
L'avant-train est suspendu par deux ressorts à lames montés sur l'essieu ; la direction est à fusée.
Sur la roue arrière, on reconnaît les deux freins actionnés par manettes au guidon et câble Bowden. L'un est par étrier agissant sur la roue arrière comme sur un vélo, l'autre est par sabot et agit sur la poulie réceptive de transmission.
 
Bauduret sur tricar Werner 1905
 
Le moteur est le bicylindre que nous avons examiné plus haut, mais en version 5 HP. Le tricar de série a une cylindrée de 504, 38 cm³ (2 x 65 x 76 mm). Pour s'adapter au règlement qui prévoyait une cylindrée maximale de 500 cm³, les tricars Werner participant au Critérium des tricars en septembre 1905 ont une cylindrée de 499,7 cm³ (2 x 64,7 x 76 mm). Par rapport à la moto 4 HP (1906) de 429,77 cm³ (2 x 60 x 76 mm) l'alésage est augmenté de 4,7 mm et 5 mm respectivement. À la différence du moteur de la motocyclette 4 HP, la culasse non détachable du moteur 5 HP est entourée d'une chemise d'eau. L'allumage est par accumulateurs ou piles et bobine qui sont rangées dans un compartiment du réservoir. L'avance à l'allumage est commandée par un système de tringles et une manette placée sur le tube horizontal du cadre, près de la douille de direction.
Le carburateur à pulvérisation et niveau constant est un Werner automatique ; pour le réglage suffit une seule manette dont l'action fait tourner un volet sous forme d'une virole qui admet une quantité d'air plus ou moins grande dans le carburateur. En fermant complètement le volet, on pouvait économiser le carburant dans les descentes (une description détaillée se trouve dans la section motocyclettes, 1902 ci-dessous). 
refroidissement par thermo-siphon, tricar Werner 1905Le refroidissement est assuré par un radiateur sous forme d'un parallélépipède allongé qui est fixé sous le châssis dans le courant d'air, entre la colonne de direction inclinée et le moteur. Ce radiateur est cloisonné, ce qui offre une certaine protection contre les projections de pierres et les trépidations. Le réservoir d'eau est placé assez haut par rapport au radiateur dans le cadre à doubles barres horizontales, immédiatement derrière la colonne de direction, pour faciliter une bonne circulation de l'eau par thermosiphon. Les flèches sur l'image ci-contre signalent la direction du débit. Flèche bleue : l'eau refroidie venant du radiateur; flèche rouge: l'eau chaude repart au réservoir après le séjour dans la culasse; flèches jaunes : l'eau encore chaude descendant du réservoir au radiateur. (Sur l'image du tricar en haut de cette section, le radiateur est dissimulé derrière le garde-boue).
Sur le tricar nouveau, le moteur n'est plus monté transversalement au sens de la marche comme sur son prédécesseur, mais face à la route, l'arbre moteur étant disposé perpendiculairement à l'axe longitudinal de l'engin, comme sur la moto. Par conséquent, on a abandonné aussi le système complexe de transmission de la Pétrolette en faveur d'une simple transmission par courroie sans changement de vitesse. La courroie de transmission est entraînée directement par l'arbre moteur via une poulie à embrayage qui ne sert pas seulement à embrayer et débrayer, mais qui permet aussi de réduire l'allure de la machine par un léger patinage de la courroie.
 
Le tricar Werner modèle 1905 conserve les pédales qui servent aussi au démarrage. Le pédalier est peut-être du type repliable qui fut breveté en 1904 (voir plus loin, motocyclettes 1904).
 
Les photos que nous avons vues jusqu'ici montrent le tricar Werner en septembre 1905, et le dessin qui se trouve au début de cette section représente le tricar modèle 1905 qui ne figure plus au catalogue 1906. En 1905, les frères Werner faisaient apparemment partie de ceux qui jugeaient préférable l'utilisation d'un bicylindre coupleux sans changement de vitesse. Mais la mauvaise performance de leurs deux tricars engagés au Critérium – Bauduret se classa 11e, le deuxième tricar arriva trop tard à la côte de Flins et ne se classa pas – a éventuellement conduit le constructeur à adopter un changement de vitesse du moins en option.
tricar Werner avec moyeu Rivierre, annonce 1906Le seul indice que nous connaissons est une annonce dans laquelle est proposé à la vente un tricar Werner équipé d'un moyeu Gaston Rivierre à deux vitesses et embrayage à cône. Étant donné qu'il était assez facile de monter un moyeu Rivierre, il s'agit peut-être d'une transformation postérieure due au propriétaire du tricar. En tout cas, la tri-voiturette qui remplacera le tricar au catalogue 1906, sera doté d'un changement de vitesse planétaire.

 
La tri-voiturette Werner 1906

 Werner trivoiturette 1906
 
Au catalogue 1906, un an avant l'apparition de la vogue de la tri-voiturette en France, figure un "tricar" qui est en réalité une véritable tri-voiturette. Les longerons sont en tôle d'acier emboutie ; l'assemblage des longerons et des traverses portant la mécanique est effectué par rivetage. La direction à volant est irréversible grâce à une boîte de direction (vis sans fin ?). L'avant-train est suspendu par des ressorts à lames, fixés aux mains au moyen d'attaches. Les garde-boues qui ne figurent pas sur toutes les images, sont du type pour voiturette. Les roues à rayons métalliques sont équipées de pneus Michelin de 650 x 60 à l'avant et de 650 x 65 à l'arrière. 
Toute la mécanique est masquée sous la carrosserie portant le baquet du conducteur. Une petite trappe du côté gauche permet de la visiter. Le bicylindre refroidi à l'eau de 5 Hp (2 x 65 x 76 mm, soit 504,38 cm³) est celui du tricar 1905/1906. Le carburateur est encore le Werner automatique qui est commandé par une seule manette, l'allumage se fait par accumulateurs et bobine ou par magnéto Simms-Bosch (en supplément de 175 fr.). Le radiateur est placé sous le châssis, le réservoir contenant 10 litres doit être monté en charge, car la circulation de l'eau se fait par thermosiphon. Il est virtuellement impossible de monter tous les réservoirs sous le châssis, puisque le réservoir d'essence (12 litres) et de l'huile (2 litres) doit être également placé en charge. On peut donc présumer que les réservoirs étaient montés sur la carrosserie, aux côtés du conducteur ou même entre la colonne de direction et le baquet, car on voit une pompe à huile type "coup de poing" fixée sur la colonne. Est-ce qu'on a supprimé les réservoirs sur le dessin pour donner un aspect plus propre de l'engin ?
Le moteur porte un changement à deux vitesses et un embrayage à cône actionné par pédale. La transmission à la roue se fait par chaîne. Il y a deux freins dont l'un est un frein à ruban qui se serre autour d'un tambour sur la roue arrière. Celui-ci sert comme frein de service et est actionné par pédale. L'autre est un frein de secours sur l'axe de commande et qui est actionné par un grand levier à portée de la main droite du conducteur. La mise en marche se fait par manivelle. Le prix de la tri-voiturette en ordre de marche était de 2 000 francs.

La tri-voiturette 6 HP 1906

Werner trivoiturette 1906, 6HP
 
En 1906 apparaît une tri-voiturette 6 HP qui ne se trouve pas dans le catalogue 1906. Ce catalogue fut peut-être déjà imprimé à l'occasion du Salon 1905 et montre encore le modèle de présérie. Nous ne savons pas si la tri-voiturette 5 HP fut produite en série ou si elle a été remplacée par la tri-voiturette 6 HP ci-dessus. La chaîne de transmission se trouve maintenant au côté gauche, le grand levier devant le baquet du conducteur a disparu. Outre le moteur plus puissant de 764 cm³ (2 x 80 x 76 mm), la technique est identique. L'image montre l'appareil avec les garde-boues type voiturette.

 
Les motocyclettes Werner 
 
Pour être complet, nous donnons ici un aperçu des modèles de motos Werner année après année avec leurs données techniques.
De l'abondante littérature qui existe sur les motocyclettes Werner, nous citons seulement l'excellente analyse de Michel Pernot dans Motocyclettiste Nº 22, 1981, p. 3 et suiv., et Nº 23, 1981-1982, p. 3 et suiv., qui traite de manière très exhaustive et perspicace la période 1897—1903; ainsi que Jean Bourdache, La motocyclette en France 1894 – 1914, 1989, passim. Les livres et articles plus récents que nous avons consultés, hormis de jolies photos en couleurs, n'offrent rien davantage. Étant donné que les ouvrages cités sont épuisés et très difficiles à trouver, nous traitons les motocyclettes de manière plus exhaustive que prévue à l'origine. 
Les auteurs remercient vivement Jean-Luc Lamouroux pour avoir partagé le catalogue 1900 et la notice sur le fonctionnement de la motocyclette Werner 1905.

1897 1898

Le premier modèle de la "motocyclette" fut présenté  au Salon du Cycle du 15 au 30 décembre 1897. C'est le modèle essayé par Thomas Robinson et dont le brevet nº 273.866 a été acquiert par Harry John Lawson.

moteur Werner 1898, dessins du brevet
Outre le moteur et sa position de montage, les frères faisaient breveter aussi de différents types de transmission sur la roue avant et l'application du brevet sur des bicyclettes pour dames et des tricycles. Hormis la transmission par courroie, la seule qui fut réalisée (mais sans galet tendeur, 2e rangée, à droite), le brevet couvre aussi la transmission par chaîne, par roues dentées et par arbre. 

Werner, types de transmission, 1898 
 
Selon le brevet, la transmission est à droite (côté admission), comme sur le dessin ci-dessus. Cependant, le modèle 1898 est à transmission à gauche (côté échappement).
 
motocyclette Werner, 1898, dessin
 
Le carter en fonte du petit monocylindre s'ouvre dans le plan du joint horizontal. Le cylindre est fondu en une seule pièce avec la partie supérieure du carter ; la culasse est un couvercle rond et plat. Le vilebrequin tourne sur des coussinets en bronze (dessin du brevet), les pignons actionnant la came et le poussoir qui lève la soupape d'échappement se trouvent à l'intérieur du carter. Les soupapes sont disposées verticalement de chaque côté du cylindre. Le piston en fonte est doté de quatre segments selon le dessin du brevet ; le dessin ci-dessus à gauche n'en montre que trois. Le graissage à barbotage se fait au moyen d'un petit graisseur placé en avant sur le carter. De chaque côté du carter est monté un volant extérieur sur le vilebrequin. Le volant à gauche porte la poulie à gorge qui est reliée par une courroie de transmission à une roue à rayons métalliques et "jante" à gorge, fixée sur l'axe de la roue d'avant. Le montage de la transmission à l'extérieur de la fourche permet d'adapter la transmission à une bicyclette ordinaire sans remplacer la fourche.  
Le moteur pèse 10 kg (plus 4 kg d'accessoires). Les indications concernant la puissance oscillent entre ½ CV (H. de Graffigny), environ ⅔ CV (La Nature) et ¾ CV (La Locomotion automobile) à 1200 t/minute. La cylindrée est de 91,2 cm³ (44 x 60 mm). La vitesse max. est de 30 – 35 km/h.
L'allumage se fait par tube incandescent vissé dans la chapelle de la soupape et chauffé par un brûleur qui est protégé du vent par une lanterne. Le réservoir d'essence pour le brûleur fait à la fois office de garde-boue.
Le carburateur à barbotage est composé d'un réservoir "R" (ci-dessus à droite) en cuivre nickelé qui peut contenir 2,5 litres d'essence et de la boîte "C" qui communique avec le réservoir. La marche du moteur est réglé au moyen d'une seule manette.
La base de la "motocyclette" est une bicyclette ordinaire dont on a changé l'axe du pédalier pour l'addition d'une roue à rochet permettant que les pieds puissent rester immobiles sur les pédales dès que le moteur a démarré.
 
Alexis Werner sur la motocyclette de 1898
 
Le moteur avec carburateur et accessoires fut aussi vendu en kit adaptable à toute bicyclette. Un frein n'est pas visible sur les photos et dessins, mais la Werner anglaise ci-dessous est munie d'un frein à sangle.
 
motocyclette Werner fabriquée par la Motor Manufacturing Company (MMC) à Coventry 1898
Motocyclette Werner construite par la Motor Manufacturing Company à Coventry, 1898

La motocyclette Werner 1898 fut aussi fabriquée en Allemagne par les Fahrzeugwerke Eisenach en Thuringe et commercialisée sous la dénomination "Wartburg".
 
dessin d'une moto Werner fabriquée à Eisenach sous la dénomination "Wartburg"
 
Malgré son grand succès, la Motocyclette avait de grands défauts. Le problème le plus grave était la mauvaise tenue de route (instabilité, dérapages). En cas de chute, le moteur prit immédiatement feu à cause de l'allumage par incandescence. Les autres difficultés étaient plutôt dans le cadre de ce qui était habituel à l'époque, comme le malfonctionnement par temps de pluie. Mais ces difficultés étaient accentuées par la position du moteur, comme le fait que les volants projetaient de l'huile sur le cavalier et l'échappement l'enfumait. Le verdict des experts était parfois assez dur : "cette bicyclette, d'origine anglaise" ... a "des défauts malheureusement très sérieux, dus à sa construction des plus médiocres et à son montage rudimentaire, lequel doit limiter considérablement sa durée. Nous avons pu nous rendre compte de ces imperfections qui font de la motocyclette un objet de bazar qui n'a, en conséquence, aucune chance de s'acclimater dans notre pays" (H. de Graffigny, 1899).
 
1899  

Au Salon 1898 fut présenté un nouveau moteur plus moderne et plus léger (9 kg) qui donne une puissance de ¾ CV – 1 CV. 

la motocyclette Werner de 1899

Le carter est désormais en aluminium et s'ouvre dans le plan de joint vertical. Les volants extérieures sont à cinq branches ("machine à coudre"). Le cylindre à dix ailettes est vissé sur le carter par quatre écrous. Le couvercle plat a laissé sa place à une culasse boulonnée sur le cylindre et qui porte, de chaque côté du cylindre, la boîte de la soupape d'admission automatique et celle de la soupape d'échappement commandée. Le dangereux allumage par incandescence a été remplacé par un allumage électrique par piles, bobine et trembleur. Le carburateur à barbotage est un nouveau modèle rectangulaire qui est relié à l'admission par un tube flexible fortement coudé qui passe au-dessus du guidon. La fourche est renforcée par deux haubans solidaires d'une plaque de support portant le moteur. 
 
photo d'une motocyclette Werner de 1899
Sur la photo ci-dessus, on reconnaît le petit godet de graissage sur le carter moteur. Le petit silencieux cylindrique perforé qui enfume le cavalier avec les gaz brûlés doit être dirigé en bas. Une petite chaîne reliée à la tige de la soupape d'échappement sert à soulever celle-ci contre la pression du ressort (décompresseur) quand le conducteur ferme à fond la seule manette au guidon (ci-dessous, à droite) qui règle la marche du moteur. Le tube oblique du cadre et le guidon portent respectivement une petite poulie de renvoi pour un câble Bowden (en l'occurrence c'est une chaîne fine) actionnant un frein à sangle au moyen d'une manette (ci-dessous).
 
photo du moteur Werner 1899
La photo ci-dessus montre le cylindre complètement ailetté qui est boulonné sur le petit carter. La culasse qui est venue de fonderie avec les boîtes à soupapes est boulonnée sur le cylindre. Le sommet de la chapelle de la soupape d'admission est fermée par un écrou, celui de la boîte de la soupape d'admission porte le tube venant du carburateur-réservoir. La bougie est vissée horizontalement dans la chapelle.
 
jeune femme sur une moto Werner 1899

 1900
 1901
 
Au Salon 1899 est présenté un modèle évolué de la motocyclette muni d'un nouveau moteur plus classique et plus puissant. Celui-ci et les améliorations concernant la partie-cycle sont décrits dans le brevet nº 296.920, déposé le 6 février 1900.
 
Werner motocyclette 1900
 
dessin de la motocyclette Werner modèle 1900
 
moteur pour motocyclettes Werner 1900L'ensemble du moteur dont le poids n'excède pas 9 kilos est fixé sur la fourche au moyen de trois boulons. La cylindrée du moteur a été portée à 217 cm³ (62 x 72 mm) ; la puissance est de 1 CV ¼ à 1500 t /minute. Les volants d'inertie sont enfermés dans le carter en aluminium qui s'ouvre dans le plan de joint vertical. Le cylindre et la culasse sont maintenant montés sur deux colonnes d'assemblage permettant un démontage aussi facile que rapide; la soupape d'admission automatique est placée au sommet de la culasse, celle d'échappement se trouve dans une chapelle ailettée à côté du cylindre. Le carburateur à barbotage est désormais lié à la soupape d'échappement par un nouveau système de tubes et raccords. Le mélange gazeux passe par l'intérieur de la douille de direction et du guidon. La poignée gauche tournante sert à régler la quantité d'air admise par un orifice pratiqué dans le guidon pour appauvrir les vapeurs trop riches. La poignée droite sert à couper l'allumage. La came qui commande l'avance à l'allumage et le trembleur sont enfermés dans un petit carter en aluminium. On peut varier les vitesses depuis 15 km/h à 50 km/h en se servant de la manette d'avance à l'allumage fixée au guidon.
La transmission se trouve au côté droit et la poulie réceptive est maintenant fixée sur la jante, à l'intérieur d'une fourche adaptée à recevoir une poulie-jante. Un frein à sangle et câble Bowden agit sur la roue arrière.
 
 
Gaston Rivierre sur la moto Werner 1900

 
1902

Le 20 novembre 1901, Michel et Eugène Werner font breveter le cadre révolutionnaire dans lequel le moteur prend la place du pédalier entre le tube oblique (a) et le tube de selle (b). L'œil recevant l'axe du pédalier est disposé dans le tube de base (c). Une deuxième barre horizontale (d) augmente la rigidité du cadre. La transmission par courroie plate actionne désormais la roue arrière.
 
 cadre pour motocyclette Werner, breveté 1901. Dessin

Un nouveau modèle remplaçant la "motocyclette" vieillissante est présenté au Salon 1901. Le cadre est celui du brevet, et le moteur, qui conserve largement l'architecture de son prédécesseur, tire maintenant 1 CV ¾ d'une cylindrée de 225,2 cm³ (64 x 70 mm). Les deux colonnes d'assemblage de la culasse ne sont plus disposées sur les petits côtés du carter, mais sur les fronts. La culasse porte un décompresseur au sommet qui est actionné par tringles et manette placée au tube horizontal, à portée de la main droite du conducteur.
 
motocyclette Werner, dessin du modèle 1902
 
Le moteur est alimenté par un nouveau carburateur maison à pulvérisation et niveau constant (brevet nº 319.984). Le réglage de la quantité admise de l'air additionnel se fait au moyen d'une manette placée au sommet du corps (voir ci-dessus).
Extérieurement, la motocyclette modèle 1902 se distingue de son successeur surtout par l'espace non rempli du triangle du cadre qui est formé par la douille de direction et le tube oblique, car le réservoir d'huile qui ordinairement remplit cet espace, est encore placé derrière le compartiment à pile, entre celui-ci et le réservoir d'essence. La moto est dotée d'un frein à étrier à l'avant, actionné par tringle et manette au guidon. À l'arrière fut monté soit un frein à sangle actionnant sur un tambour solidaire du moyeu, soit un frein à étrier actionnant sur la jante.
 
le carburateur Werner, dessin issu du brevet 1902
Le carburateur Werner (1902)
 
Le carburateur Werner présente plusieurs particularités qui le font "inédit" (selon la publicité Werner). Ce carburateur n'est pas fait en bronze, cuivre ou laiton, mais en aluminium, ce qui faisait nécessaire de baguer en bronze toutes les parties subissant un frottement afin d'éviter une usure rapide. De plus, la cuve d'essence n'est pas séparée du corps du carburateur et reliée par un canal à celui-ci, comme sur la plupart des carburateurs d'époque. Ici, la cuve d'essence est surmontée par la chambre de pulvérisation avec gicleur et dispositif de réglage. Par conséquent, le carburateur Werner est un carburateur à flux transversal. L'air pur "aspiré" entre en "f", se mélange avec le carburant et passe par le canal "d" à la soupape d'admission (e).
carburateur De Dion Bouton, 1901Remarquons en passant que cette conception n'est pas si novatrice que voulait bien faire croire Werner, car le carburateur de Dion-Bouton de 1901 est tout à fait comparable à ce sujet. (agrandir la miniature ci-contre).
Sur le carburateur Werner, l'essence arrive au récipient par une valve (p) qui est commandée par le flotteur. La valve (p) est appliquée sur son siège (q) par un ressort (r). Lorsque le récipient est vide, le flotteur appuie sur le poussoir "s" solidaire de la valve (p) et maintient celle-ci ouverte. Dès que la cuve se remplit jusqu'à une certaine hauteur, le flotteur surnage, la valve (p) se ferme en arrêtant l'arrivée de l'essence. Sur le couvercle du carburateur est placé un petit poussoir qu'on actionne au départ pour remplir le récipient. La cuve est vissée dans la partie supérieure du carburateur qui est constituée principalement par les deux cônes divergents du canal d'admission qui forment un Venturi. Sous l'action de la dépression créée par le flux vigoureux de l'air passant perpendiculairement à la zone du gicleur (c), l'essence monte dans le tube (j) du gicleur et est obligée à jaillir à travers le gicleur (c) en quantité proportionnelle à celle de l'air admise par l'orifice "f". Dans la partie supérieure de la pièce "b", au-dessus du gicleur (c), se trouve une virole (h) actionné par la manette placée au sommet du carburateur. Cette virole démasque plus ou moins une prise d'air (i) additionnelle pour appauvrir le mélange gazeux.
 
motocyclette Werner modèle 1902, photo ancienne 
Le propriétaire de cette Werner modèle 1902 a remplacé le carburateur original par un Longuemare, une modification apparemment assez fréquente, car le carburateur Werner pouvait être à l'origine d'une marche irrégulière du moteur (manque de carburant à cause du fait que le poussoir de la valve à ressort permettant l'arrivée de l'essence est trop près de la base de l'ajutage ; la distance préconisée par le fabricant entre le poussoir et le tube du gicleur n'est que de 23mm!).
 
1903

Au Salon 1902, Werner présente deux modèles nouveaux, le type "Touriste" pour monsieur tout le monde et le type de course "Paris – Vienne" pour les "jeunes gens amoureux de folles vitesses" et les "professionnels" (catalogue 1903).
 
moto Werner, dessin du modèle 1903
 
L'espace entre les barres horizontales du cadre est maintenant complètement rempli par le réservoir d'essence (4 litres pour au moins 150 km) en avant, le compartiment à accumulateur au milieu et le réservoir d'huile en arrière. La séparation spatiale entre les deux réservoirs évite qu'une fuite dans la cloison de séparation reste inaperçue jusqu'à ce que le mélange des liquides ait causé de graves problèmes.  

Le type Touriste :

moto Werner 1903 type Touriste
 
moto Werner 1903 type Touriste 2HP
Modèle "Touriste" 1903 à moteur 2 CV et 261,5 cm³ (68 x 72 mm)

moteur Werner 2HP, 1903

 
moteur Werner type touriste 2 CV
 
 
Le type "Course" :
 
Auguste Bucquet et Georges Labitte
Auguste Bucquet, gagnant de Paris-Vienne et Georges Labitte, vainqueur du Critérium de Provence

Le modèle Paris-Vienne à moteur 2 HP ¾ fut baptisé d'après la course Paris – Vienne (26 – 29 juin 1902, 1500 km) remportée par Auguste Bucquet (1er, 25 h 11 m) et Georges Labitte (2e, 25 h 23 m) sur Werner.
 
motocyclette Werner type course Paris-Vienne, modèle 1903
 
motocyclette Werner type course Paris-Vienne, modèle 1903, photo
Modèle Course (Paris-Vienne) 1903 à moteur 3 CV et 344,8 cm³ (76 x 76 mm), vitesse maximum 70 km/h.
moteur Werner type course 3 CV
 
Les moteurs sont maintenant alimentés par un nouveau carburateur qui se distingue de son prédécesseur par l'ajout d'un étrangleur (boisseau) qui permet de régler la quantité de mélange gazeux admise au cylindre. Le conducteur dispose désormais de deux manettes métalliques pour le réglage du carburateur, placées sur le tube horizontal près de la douille de direction. L'une (à gauche) commande, comme jusqu'ici, la quantité additionnelle d'air admise, c'est-à-dire la carburation, alors que l'autre (à droite) permet de réduire le volume des gaz carburés admis au moteur pour modérer la vitesse et économiser du carburant. Le carburateur permet l'emploi de toutes les essences pour automobiles (densité 700º – 720º), y compris l'alcool pur ou mélangé à 50% à l'essence.
 
moteur Werner, allumage, 1903
La came d'allumage et le galet du trembleur se trouvent en dehors de la boîte d'allumage. De cette façon, le conducteur peut amener la lame de celui-ci en contact avec la vis platinée pour contrôler l'étincelle sans ouvrir la boîte.

L'allumage se fait par un accumulateur rechargeable donnant une autonomie de 2000 km, une bobine placée sous la selle et enfermée en une boîte d'ébonite ainsi qu'un trembleur à galet qui est, conjointement avec le pointeau platiné, enfermé dans un carter cylindrique, fermé à son tour d'une plaque de micra transparente qui permet de regarder si l'étincelle se produit. La distance entre le point platiné du trembleur et le pointeau doit être d'un millimètre, le trembleur étant au repos. La vis du pointeau est bloquée par un écrou de serrage (ci-dessus). L'allumage se règle par une manette avec manche en bois placée à droite sur le tube horizontal du cadre. La vitesse de la moto Touriste varie de 12 à 55 km/h, selon l'avance à l'allumage et la carburation. Une quatrième manette (côté gauche), également avec manche en bois, sert à ouvrir ou fermer le robinet de compression. La poignée de gauche sert à interrompre le courant. 
La transmission se fait par l'intermédiaire d'une courroie plate en cuir qui est plus large que celle du modèle 1902. La nouvelle poulie du moteur est formée d'une série de rondelles de cuir entre les plateaux métalliques pour empêcher le glissement de la courroie.
Également nouveau est le silencieux qui se présente en forme d'un cylindre dont les bases sont perforées pour laisser s'échapper les gaz brûlés. Il est vissé à un tube d'échappement plus long et disposé transversalement devant le carter moteur.
Les deux freins commandés par manettes au guidon sont aussi d'un modèle entièrement nouveau ; l'un agit sur la roue avant par friction, l'autre sur la poulie rivée à la roue arrière.
 
Werner, cadre pour motocyclettes 1903
 
Le cadre en tubes renforcés est celui breveté en novembre 1901. Sa hauteur est de 56 cm (60 cm sur demande spéciale) avec des roues de 600 mm. Les modèles 1903 ont été livrés munis de pneus Michelin type "motocyclette" (renforcés) à talons d'une section de 50 mm. Sur demande spéciale étaient disponibles aussi des pneus Dunlop (gomme noire). Le poids de la moto modèle 1903 est de 38 kilos environ.

1904

1904 est l'année des moteurs monocylindriques à soupapes commandées chez Werner. Dans une lettre en date du 28 juin 1904, la maison Werner Frères Ltd fournit à un client les mesures des trois moteurs différents pour motocyclettes qui la marque construit actuellement : il s'agit d'un 2 CV ½ de 70 x 76 mm, d'un 3 CV ¼ de 76 x 80 mm et d'un 4 CV ½ de 85 x 90 mm.
 
moto Werner, modèle 1904
Le carburateur de la Werner 1904 occupe un petit compartiment dans la partie centrale du réservoir. 

 Paris-Bordeaux 1904 Bonnard sur Werner
Paul Bonnard sur motocyclette Werner, Paris-Bordeaux 1904 
 
Le cadre de la nouvelle motocyclette Werner présentée au Salon 1903 est toujours basé sur le brevet de novembre 1901. Il est établi en tubes d'acier étiré, ayant une épaisseur de 1 mm et une section de 30 mm. Les raccords sont garnis intérieurement de fourrures en tubes.
 
cadre Werner pour motocyclette 1904
 
Le moteur est suspendu dans le cadre par deux boulons (D, C), dont l'un traverse la petite fourche du tube oblique et l'autre le noyau B.
 
Le nouveau moteur Werner 3 CV ¼ est un monocylindre à soupapes latérales. Celles-ci sont commandées par un arbre à cames qui est logé dans un tunnel incorporé dans le côté étroit du carter.
 
 moteur Werner 1904

Nous avons déjà présenté ce moteur en connexion avec le bicylindre du tricar (voir plus haut) ; maintenant, on l'examine plus en détail. La culasse détachable est montée sur deux colonnes d'assemblage (L, L'), la partie inférieure du cylindre, étant moins susceptible à chauffer, n'est pas ailettée. Au sommet de la culasse est placé un décompresseur (D) actionné par une tringle et par la même manette qui commande l'avance à l'allumage, de sorte que, en plein retard d'allumage, le décompresseur est ouvert. Immédiatement au-dessus de la soupape d'admission est placée la bougie (B). Les petites chambres d'admission (A) et d'échappement (E) sont placées en dehors, très dégagées de la culasse pour améliorer le refroidissement. L'image ci-dessus à droite montre la disposition des soupapes commandées par un arbre à cames disposé latéralement. Les cames de ce petit arbre sont placées en opposition à 180º. Sur son extrémité gauche se trouve la boîte d'allumage (C). De l'autre côté est visible une trappe (T) qui permet de visiter l'arbre à cames. Sur les modèles à allumage par magnéto, on y trouve un pignon monté sur l'arbre à cames qui entraîne la magnéto par chaîne. La poulie (P) sur l'arbre moteur contient un système de débrayage que nous examinerons en détail plus loin dans le texte.
régulateur, breveté par les frères Werner en 1903Sur l'image ci-dessus à gauche on voit le couvercle (R) de la distribution, qui s'effectue par une cascade successive de trois pignons, et la boîte d'allumage (C). Cette boîte contient aussi une roue dentée qui permet un double allumage (ci-dessous). En tournant la poignée droite du guidon, le conducteur peut choisir entre l'allumage normal tous les deux révolutions de l'arbre moteur et un allumage tous les quatre révolutions pour une marche ralentie de la moto dans les agglomérations.

Ci-contre : dessin du brevet nº 336.991, déposé par Eugène et Michel Werner le 10 novembre 1903, concernant un "Régulateur électrique pour moteurs de motocyclettes et autres véhicules automobiles". L'objet de la description suivante est la version réalisée d'après le brevet.
 
le double allumage Werner, 1904Fonctionnement : la poignée droite est branchée à deux fils, dont l'un (L) aboutit à la vis platinée "V". Installé sous la poignée est un levier qui agit comme rupteur et qui coupe le courant sur le fil "L" quand la poignée est tournée. En même temps, ce rupteur établit le contact avec le deuxième fil "M"qui est connecté à une autre vis platinée (S) à la partie inférieure de la boîte d'allumage. L'arbre à cames porte aussi la came pointue qui soulève le trembleur (T) et le met en contact en un point "P" avec la vis platinée. En retombant, le trembleur provoque une rupture du courant et détermine par arrachement le jaillissement de l'étincelle entre les électrodes de la bougie. C'est l'allumage normal tous les deux révolutions. Si l'on coupe le contact en tournant la poignée, le rupteur établit le contact avec le fil "M" qui amène le courant à la vis platinée "S". Entre la vis "S" et la came est visible une roue dentée "A" qui est entraînée par l'arbre à cames de cette façon, que la roue dentée "A" tourne avec la moitié de la vitesse de l'arbre à cames. Sur la roue dentée "A" est placé un ergot "O" qui ne vient que tous les deux tours en contact avec le linguet élastique signalé par la flèche rouge et la vis platinée "S" branchée au fil "M". C'est l'allumage tous les quatre tours du moteur.
Ce dispositif permet de réduire l'allure de la moto et d'éviter les à-coups qui se produisent toujours quand on coupe et remet constamment le contact. De plus, on peut marcher à une vitesse très réduite dans les encombrements, si l'on combine l'allumage tous les quatre tours avec le débrayage de la poulie, sans avoir besoin de pédaler.
 
moto Werner, monocylindre 2 HP 1/2 à soupapes commandées, 1904
La moto Werner 2 CV ½ à soupapes commandées, 1904. (voir l'encart publicitaire complet)
moteur Werner 2,5 HP à soupapes commandées
Le moteur 2 CV ½ (ci-contre), également à soupapes commandées, ne bénéficie pas de ce régulateur. La boîte d'allumage a la forme d'un U, comme sur le bicylindre. 
Le carburateur Werner automatique occupe un petit compartiment dans la partie centrale du réservoir. Les parois de ce compartiment sont perforées afin que le carburateur puisse aspirer de l'air. Il est réglé par une seule manette. Un volet permet la suppression complète des gaz carburés (étrangleur).
 
La poulie extensible. Une autre innovation concerne la transmission : la courroie, qui n'est plus plate, mais trapézoïdale, est entraînée directement par l'arbre moteur via une poulie à embrayage qui ne sert pas seulement à embrayer et débrayer, mais qui permet aussi de réduire l'allure de la machine par un léger patinage de la courroie. Dans les côtes, on utilise ce patinage pour atteindre le haut de la montée sans l'aide des pédales. 
 
Embrayage, breveté par les frères Werner en 1903
Eugène et Michel Werner, Dispositif d'embrayage et de débrayage pour motocyclettes
et autres applications (brevet nº 336.983, demandé le 5 novembre 1903).
 
poulie de l'embrayage breveté par Eugène et Michel WernerLa description suivante du fonctionnement de la poulie est basée sur le schéma simplifié à gauche : la poulie est constituée par une joue B mobile et une joue C fixe, qui comporte un épaulement D formant boîte. La joue B est évidée suffisamment pour permettre à l'épaulement D de venir s'y loger. L'ensemble est monté sur l'arbre E et fixé à celui-ci, d'un côté par une rondelle H' et un écrou I, et de l'autre côté par une rondelle mobile A. Un clavetage L, qui sert en même temps de glissière à la joue B, empêche la poulie de tourner folle sur l'arbre. Dans la boîte formée par l'épaulement D est logé un fort ressort à boudin, dont la détente écarte la joue B. L'écartement, en se produisant, fait tourner la rondelle A sur le pas de la vis que comporte l'arbre E et provoque le débrayage (brevet dessin ci-dessus). Quand le conducteur actionne au moyen du câble Bowden de transmission le levier qui fait tourner la rondelle A sur elle-même, elle vient de faire serrage sur la face B de la poulie, comprime le ressort renfermé dans la boîte D et amène les joues de la poulie l'une contre l'autre. C'est la position de l'embrayage, qui est représentée sur le dessin à gauche et sur celui du brevet ci-dessus.
L'embrayage est commandé au moyen d'un câble sous gaine, lequel est actionné par la poignée de gauche du guidon. Un encliquetage permet de serrer plus ou moins les joues de la poulie et de les maintenir dans cette position. Un simple poussoir, en faisant manœuvrer le cliquet, permet de débrayer instantanément.
 
Une autre nouveauté est un pédalier repliable, breveté en 1904 :

le pédalier Werner 1904
 
Ce pédalier dispose d'un système de déclenchement permettant de mettre les pédales, qui sont ordinairement opposées sous un angle de 180º, en parallèle, de sorte que le cavalier puisse être debout sur les pédales comme sur des étriers. Le déclenchement s'opère lorsqu'on contre-pédale d'un demi-tour en arrière. Un puissant ressort (B) entourant l'axe (A) du pédalier ramène les pédales dans leur position normale, dès que l'on cesse d'appuyer.
 
1905

À partir de 1905, le bicylindre équipe aussi les motos Werner, mais dans une version plus petite de 3 CV ¼ (2 x 55 x 76 mm, soit 361, 13 cm³).
 
 motocyclette Werner modèle 1905
 
motocyclette Werner bicylindre 1905, dessin
 
le moteur bicylindrique Werner, 1905La nouvelle Werner conserve le cadre apparu en 1902, mais la fourche est maintenant renforcée par deux haubans. Le réservoir est à trois compartiments; en avant est situé le réservoir d'essence, au milieu se trouve le compartiment pour l'accumulateur et la bobine, et en arrière est disposé le petit réservoir d'huile. Le carburateur n'est plus enfermé dans un compartiment du réservoir. Il y a toujours deux freins à étrier actionnant respectivement sur la jante de la roue avant et sur la jante de la roue d'arrière.
 
Nous avons déjà parlé du moteur bicylindrique au début de ce chapitre, raison pour laquelle nous pouvons nous limiter ici à signaler quelques détails visibles sur les photos d'une Werner 1906.
  
Sur la photo ci-contre, on reconnaît la pipe d'admission à deux tubulures avec les soupapes automatiques.  Les bougies sont placées au sommet de la culasse, dans les axes des cylindres. Au premier plan est visible le système de la commande de l'avance à l'allumage.
Michel et Eugène Werner, moteur bicylindre, 1905
 
Vu du côté de la distribution, le bicylindre se distingue facilement du monocylindre à soupapes commandées par l'absence des colonnes d'assemblage et le grand carter d'allumage qui héberge deux trembleurs et dont le contour prend la forme d'un U. Ce carter en bronze est fermé par une porte à charnières.
 
Werner, moteur bicylindrique, 1905

Vu du côté de la transmission le moteur ressemble beaucoup au monocylindre à soupapes commandées. Les signes distinctifs sont les colonnes d'assemblage manquantes, les soupapes d'admission au sommet de la "chapelle" et les bougies placées dans l'axe du cylindre au cas du bicylindre. Au premier plan est visible un lève-soupapes actionné par câble. 
 
pipe d'admission du carburateur Werner 1905Le carburateur en aluminium de cette Werner modèle 1906 se signale par la sortie des gaz carburés vers le haut. Sur la publicité, les modèles 1905 et 1906 sont munis du carburateur à flux transversal. La notice d'entretien 1905 montre cependant le dessin de la partie supérieure d'un tel carburateur à sortie des gaz en haut. Ce carburateur existait donc déjà en 1905. Sur la photo ci-dessus, on voit l'entrée de l'air pur qui est protégée par une plaque en tôle perforée. De l'autre côté de cette ouverture est placée la manette commandant la bague d'admission d'air qui peut masquer graduellement l'entrée de l'air. Ce carburateur est également muni d'un étrangleur commandé par tringle et manette.
 
"Les motocyclettes sont vouées à la disparition à cause de la vibration excessive" informe la publicité ci-dessous en invoquant un article du quotidien Daily Mail. Le remède contre cette menace est la nouvelle fourche élastique Werner. Cette réclame en date du 6 juin 1905 démontre que la fourche élastique Werner a apparu déjà un an plus tôt en Angleterre.
 
publicité anglaise pour motos Werner avec fourche élastique, 1905
 
1906

Hormis la tri-voiturette, la nouveauté la plus importante en 1906 est l'implantation d'une fourche élastique de série sur tous les modèles, à l'exception du modèle 2 HP ½ "Simplex", où cette fourche n'est montée qu'en supplément (25 francs).
 
La fourche élastique 1906, moto Werner Montagnarde 3 HP
 La fourche élastique Werner équipant ici une "Montagnarde" de 3 HP.
 
La nouvelle fourche élastique Werner est à roue poussée, l'axe de la roue étant fixé à des biellettes suspendues dans la fourche et qui basculent contre la force de deux ressorts à boudin travaillant en extension ("bottom-link fork"). Le débattement est très faible.

La motocyclette "2 cylindres" poursuit son chemin, maintenant déclinée en deux versions : le modèle "Grand Luxe", une nouvelle 4 HP de 2 x 60 x 76 mm, soit 429,77 cm³, et le modèle "Touriste", la 3 HP ¼ (2 x 55 x 76 mm, soit 361,13 cm³) de l'année précédente, mais à fourche élastique.
 
moto Werner, modèle 1906
Catalogue 1906
 
Données téchniques selon le catalogue 1906 : cadre 57 ou 60 cm, fourche élastique "Werner". Moteur : Werner 4 CV, 2 cylindres, 60 x 76 mm, placés côte à côte, cylindres isolés assurant un refroidissement parfait, lève-soupapes. Ou moteur Werner 3 ¼ CV, 2 cylindres 55 x 76 mm côte à côte, lève-soupapes. Décompresseur sur les soupapes d'échappement. Carburateur : Werner automatique avec étrangleur. Allumage : par accumulateur, bobine d'induction et trembleurs, en supplément allumage par magnéto Simms-Bosch (175 fr.). Transmission : par courroie trapézoïdale. Pneus : Michelin 650 x 55 mm. Prix : "La Touriste" 3 HP ¼, 900 francs. Modèle Grand Luxe 4 HP, 1.000 francs.
 
Motocyclette Werner, 1906, photo
  La motocyclette Werner 4 HP Grand Luxe

Motocyclette Werner, 1906, photo
 
Destinés aux clients qui désiraient une machine à un prix plus abordable étaient deux modèles munis de moteurs monocylindriques à soupape automatique, la 2 HP ½ "Simplex" et la 3 HP "La Montagnarde". Leur cadre correspond à celui des machines à deux cylindres.
 
Le type Montagnarde sur une photo prise en 1904
Motocyclette Werner type Montagnarde à fourche élastique.
La photo date de décembre 1904 et démontre l'existence de la 3 HP déjà en 1905.
 
Les données téchniques, selon le catalogue 1906 : cadre 57 ou 60 cm, fourche élastique "Werner" (sauf Simplex). Moteur : Werner 2 HP ½, 70 x 76 mm, soupape automatique. Ou moteur Werner 3 HP, 76 x 80 mm, soupape automatique. Carburateur : Werner automatique avec étrangleur. Allumage : par accumulateur, bobine d'induction et trembleur ; en supplément allumage par magnéto Simms-Bosch (175 fr.). Transmission : par courroie trapézoïdale. Pneus : Michelin 650 x 55 mm. Prix : Simplex 2 HP ½ : 700 francs. "La Montagnarde" 800 francs.
La Simplex est le successeur de l'ancienne Touriste qui à son tour est devenue une 3 HP ¼ à deux cylindres. Extérieurement, elle se distingue de la "Montagnarde" par sa fourche avant rigide.
 
motocyclette Werner, modèle 1906, bicylindre, photographie
Motocyclette Werner à deux cylindres et fourche élastique.

1907 — 1908

En 1907 sont encore trois modèles de motocyclettes au programme : la 4 HP à deux cylindres verticaux, la 2 HP ½ à moteur monocylindrique et la 2 HP ¾ monocylindrique type course. Au Salon 1907, Gallien et Sarda présent aussi une bicyclette munie d'un moteur de 198 cm³ (60 x 70 mm) qui ne développe que 1 CV. Cette bicyclette à moteur pèse 28 kg en tout et atteint une vitesse de 45 km/h en palier.
 
La Werner, bicyclette à moteur 1908
La bicyclette à moteur, modèle 1908
 
Un exemplaire d'une telle bicyclette à moteur est conservé dans le musée d'Uzès (photo Bourdache, op. cit. p. 290).
L'image ci-dessous montre le modèle 1911, dont la puissance a grimpé à 1 HP ½. 
 
moto Werner 1911
La bicyclette à moteur 1 HP ½ de 1911
 
Les voiturettes Werner
 
La reprise à la fin de l'année 1906 de la maison Werner par Robert Gallien et Louis Sarda annonce une nouvelle étape. La production de motocyclettes à un et à deux cylindres continue, mais la marque se concentre désormais sur le marché plus prometteur de la voiturette populaire. Consciente de l'importance de la compétition pour la réussite commerciale, la marque participera à toutes les manifestations sportives importantes et engage de très bonnes pilotes comme Victor Rigal, Léon Molon et Maurice Fournier.
 
Encore de l'époque de la société Werner frères Ltd (juillet 1906) date le brevet (non retrouvé) d'une suspension arrière pour voitures. Le but de l'invention est d'augmenter le confort des passagers dans le siège d'arrière, qui se trouve directement au-dessus de l'essieu et reçoit par répercussion la totalité des chocs de la route, au moyen d'un ressort additionnel et des leviers de friction sous le siège.
 
Werner, suspension pour voiturettes
 
L'existence de ce brevet laisse penser que Werner frères Ltd aussi avait déjà pris la décision de se lancer dans la production de voitures.
 
1907 — 1909 Robert Gallien et Louis Sarda, constructeurs
Voitures et motos Werner

1907
 
 Victor Rigal sur voiturette Werner 1907
Victor Rigal sur voiturette Werner 7 CV lors de la Coupe des voiturettes en 1907
 
Au Salon 1906 est présentée la première voiturette Werner 7 CV qui est munie d'un moteur à deux cylindres (2 x 70 x 100 mm, soit 769,7 cm³). Le refroidissement à eau s'effectue par thermosiphon ; l'allumage est par accus ou magnéto, au choix de l'acheteur. Un nouveau carburateur automatique permet moyennant l'étranglement des gaz d'obtenir toutes les allures d'un homme au pas jusqu'à la vitesse de 45 km/h. L'embrayage se fait par cône droit garni de cuir. Le changement de vitesse est du type à train baladeur. Il comporte trois vitesses plus marche arrière, la troisième vitesse est en prise directe. La transmission se fait par cardan, les pignons du différentiel sont montés sur des roulements à billes. Le châssis est en tôle emboutie. La carrosserie est à deux places et pointe de course à l'arrière.
 
1908 

Au Salon 1907 sont présentées une nouvelle voiturette 7 CV (ci-dessous), une 8 – 10 CV, les deux munies de moteurs bicylindres, et une voiturette 10 – 14 CV à quatre cylindres.
 
La voiturette, le moteur et la motocyclette Werner
 
Le moteur de la voiturette 7 CV est à deux cylindres jumelés de 808,2 cm³ (2 x 70 x 105 mm). Le vilebrequin tourne dans des coussinets en bronze phosphoreux ; toutes ses portées sont trempées et rectifiées. Les deux manetons sont calés à 360º. Le refroidissement est à eau qui circule par thermosiphon. L'embrayage est du type classique à cône garni de cuir. La boîte de vitesses à un seul train baladeur offre trois marches et une marche arrière. La transmission est à cardan longitudinal.

La voiturette 8 — 10 CV
 
Dieppe 1908, les trois Werner
L'équipe Werner au Grand Prix de l'A.C.F. à Dieppe (juillet 1908) : Léon Molon (nº 17), Jean Vallée (nº 58) Prince Sturdza (nº 40) sur voiturettes 10 CV Werner. Les moteurs ne sont pas les deux cylindres de série, mais des monocylindres imposés par le règlement : moteur de Dion-Bouton 1 cyl., alésage x course 100 x 150 mm (ou 160 mm, les deux indications existent), soit 1178,1 cm³ (ou 1256,6 cm³), 4 vitesses, la troisième en prise directe, la quatrième par un pignon de multiplication, régime du moteur 1600 t/ min., embrayage à cône cuir, refroidissement par thermosiphon, graissage par pompe, empattement de la voiture 2,30 m, voie 1,35 m, poids 700 kg, roues de 815 x 90. Transmission par chaîne pour gagner du poids.
 
Châssis de la voiturette Werner, schéma
 
La voiturette 8 / 10 HP à deux cylindres de la Société des automobiles Werner utilise un châssis droit en tôle emboutie. Les entretoises sont renforcées au moyen de goussets en tôle d'acier qui viennent affleurer la partie supérieure des longerons et des traverses avant et arrière. Le groupe moteur est supporté par un faux châssis en cornières formant berceau. Le châssis repose sur les essieux, dont celui d'avant est en tôle emboutie, par l'intermédiaire des ressorts à lames. Ceux-ci sont placés sous le châssis en avant et latéralement – en dehors du châssis – en arrière pour éviter que l'essieu heurte la caisse en cas de forts impacts. Les mains de ressorts en arrière sont très longues, ce qui permet de monter des ressorts plus longs et de ce fait plus souples.
 
 Châssis de la voiturette Werner, photo
  
direction et embrayage de la voiturette WernerLe moteur à deux cylindres jumelés est refroidi à eau qui circule par thermosiphon. Avec un alésage de 80 mm et une course de 100 mm, il affiche une cylindrée de 1005,31 cm³ et une puissance de 8 – 10 HP. Les soupapes d'échappement sont commandées par un arbre à cames disposé parallèlement au vilebrequin et entraîné par trois pignons, dont le pignon intermédiaire a un diamètre double de celui du vilebrequin. La distribution est enfermée dans un carter étanche, installé sur la partie avant du carter moteur. La magnéto haute tension Nieuport est entraînée par une deuxième roue dentée placée sur l'arbre à cames. Les soupapes d'admission automatiques sont enfermées dans une seule pipe à deux tubulures qui est reliée à un carburateur Werner.
La transmission de la force du moteur aux roues arrière se fait via un embrayage à cône garni de cuir, une boîte à trois marches et marche arrière à un seul baladeur, un cardan longitudinal à emmanchement carré et un différentiel. Il y a un frein de service agissant sur le différentiel et commandé par pédale, ainsi qu'un frein de secours agissant sur les tambours des roues arrière et commandé par un long levier à main.
 
Dieppe 1908, Leon Molon sur voiturette Werner
Léon Molon, Dieppe 1908
 
1909 

Les voiturettes Werner modèles 1909 de 7, 9, 10 et 15 HP sont toutes munies de moteurs de Dion-Bouton, soit monocylindrique, soit à 4 cylindres monobloc (10 et 15 chevaux). Une idée de la carrosserie donnent les voitures de course ci-dessous.
 
 Maurice Fournier sur voiturette Werner à Boulogne-sur-Mer en 1909

Maurice Fournier sur  voiturette Werner lors de la Coupe des voiturettes à Boulogne-sur-Mer en 1909
(ci dessus et ci-dessous)


Maurice Fournier sur voiturette Werner à Boulogne-sur-Mer en 1909

Sur cette voiture de course, on a remplacé la transmission par cardan par deux chaînes disposées de chaque côté du véhicule pour gagner du poids, car le pont et l'arbre à cardan sont beaucoup plus lourds. Le moteur est un monocylindre de Dion-Bouton de 1993,5 cm³ (100 x 250 mm).
 
 
1911 — 1914  Maillard, Établissements Werner

Par manque d'information sur la dernière étape des Éts. Werner à Billancourt, nous nous limitons à présenter les modèles de voiturettes connus des années 1911 et 1912.
 
  1911

Grâce à la publicité ci-dessous, nous connaissons deux modèles de voitures légères fabriqués par Maillard, une 10 – 12 HP et une 14 – 18 HP. Les deux étaient disponibles avec châssis à deux et à quatre places. Les données relatives à la vitesse maximum et la consommation concernent les versions en deux places.  
 
dessin publicitaire de la voiturette Werner 1911
publicité Établissements Werner 1911
 
1912
 
affiche "Les châssis Werner" 1912
 
Le châssis de la voiturette Werner 1912 est fait en tôle d'acier emboutie. Afin d'éviter de longues pattes de fixation, le groupe moteur reposé sur un faux-châssis formé de deux longerons.
 
Photo du moteur de la voiturette Werner 1912
 
Le moteur est un monobloc à quatre cylindres dont la cylindrée est de 2412,74 cm³ (4 x 80 x 120 mm). Le vilebrequin repose sur un palier central (3 paliers en tout). Les soupapes d'admission et d'échappement se trouvent sur le côté gauche du moteur et sont commandées par un même arbre à cames. Ils se cachent dans un compartiment étanche, derrière deux plaques en aluminium (P, ci-dessus) maintenues chacune en place par un écrou à oreilles. Le carburateur est un Claudel.
 
Photo du moteur de la voiturette Werner 1912
 
La magnéto est une Bosch. La circulation de l'eau de refroidissement se fait par thermosiphon, le réservoir d'eau formant corps avec le radiateur. Le graissage du moteur s'effectue par une pompe à huile placée en avant du carter. Celle-ci refoule l'huile contenue dans un réservoir qui se trouve dans un graisseur sur le tablier de la voiture. Ce graisseur contient à sa partie supérieure un collecteur qui laisse couler l'huile par deux viseurs.
 
embrayage Werner 1912, schéma
 
L'embrayage est à cône inverse, le cône femelle (C) étant boulonné sur le volant (A). Quand la pédale est libérée, le cône mâle vient s'appliquer contre le cône femelle à cause de la pression du ressort "R". La garniture d'embrayage est en cuir.
 
transmission de la voiturette Werner 1912, photo
 
La boîte de vitesses est à quatre marches et marche arrière. Le quatrième rapport est en prise directe. Les vitesses sont engagées moyennant le déplacement de trois trains baladeurs. L'arbre primaire est relié par un joint à cardan au cône mâle de l'embrayage. Les baladeurs qui engagent les vitesses avant glissent sur un arbre à rainures (C), le baladeur de la marche arrière coulisse sur un arbre intermédiaire. Chacun des baladeurs est commandé par une fourchette (F).
 
Boîte de vitesses de la voiturette Werner 1912, schéma
 
La transmission est du type à pont oscillant. Cela veut dire que ce sont les ressorts qui supportent l'effort (poussée) qui exerce le mouvement d'avant en arrière et réciproquement du pont. On épargne donc les bielles de poussée que l'on monte d'habitude sur les voitures puissantes et qui peuvent gêner les déplacements de l'essieu arrière.
 
Le pont arrière de la voiturette Werner, coupe, schéma, 1912
 
L'arbre de cardan (A) est enfermé dans un tube d'acier et tourne sur des roulements à billes. Le carter d'essieu est assemblé par des tubes coniques d'acier forgé ; les ressorts portant le châssis reposent sur l'essieu par l'intermédiaire des patins de ressort. Les roues sont montées sur deux roulements chacune.
 
 
 
 
 
 
Chapitre créé le 27 juin 2020
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