Au Coin du Tricar

Protin et Giroux




Le tricar Protin et Giroux, semble-t-il, ne fut jamais produit en série, mais est resté une construction individuelle, réalisé pour le service propre de ses constructeurs. Il s'agit apparemment d'un modèle destiné à présenter le châssis à suspension intégrale inventé et breveté par les constructeurs.

Avant de nous pencher sur le tricar, résumons brièvement le peu que l'on sait de ses concepteurs :
 
Gaston Théophile Protin est née à Paris le 28 mai 1878 comme fils du faïencier Omer Félix Protin et d'Eugénie Sophie Lecureux, également faïencière de profession, puis libraire. Il est mort pour la France le 25 avril 1915 aux Éparges (Meuse). Le 20 septembre 1904, Protin s’est marié avec Marie Louise Baudry, née le 25 avril 1886 à Moulins.
Protin commençait sa carrière professionnelle en tant que dessinateur au Service géographique de l'armée. Après son service militaire, il s'est orienté vers une carrière d'ingénieur aéronautique et a construit en collaboration avec Camille Contal deux aéroplanes en 1909 et 1910.






Les trois photos ci-dessus montrent le monoplan à deux hélices Protin - Contal à moteur Dansette-Mutel 40CV
 
C'est peut-être à ses relations avec Contal que l'on doit la naissance du Mototri Contal type C avec châssis et suspension Protin-Giroux.
 
Paul Louis Giroux, l’ami de Protin, est né le 16 avril 1881 à Landrecies (Nord). Ses parents étaient François Pierre Giroux (*1834) et Eugénie Péchard. François Giroux était adjoint du Génie et chevalier de la Légion d'Honneur.
L'amitié entre Paul Giroux et Theophile Protin remonte probablement à leur période militaire commune, car Paul était également dessinateur au Service géographique de l’armée et ingénieur.


Le tricar Protin et Giroux


 
 
Le châssis réalisé d’après le brevet Nº371.072, demandé le 9 novembre 1906, est fait en tôle d’acier emboutie. Il se compose de deux longerons carrés dédoublés vers l’arrière, en deux parties jumelées qui sont entretoisées transversalement et verticalement par des traverses. L’ensemble forme une sorte de cage dans lequel se vient placer la roue arrière. Pour faciliter le démontage de la roue arrière, les traverses sont amovibles. L'axe de la roue arrière est monté entre deux paires de ressorts à lames en regard les uns des autres et dont les rouleaux sont articulés au moyen de jumelles simples ou doubles.
 
 
Ci-dessus: a glissière curviligne coulissant dans les glissières 4 solidaires du châssis. 5 axe de la roue. 7, 8 ressorts de suspension, le ressort inférieur 8 fait office de ressort compensateur qui atténue le fléchissement exagéré du ressort supérieur 7 suite à un choc. 6 tendeurs de réglage de la roue.
 
La distance de la roue arrière au pignon de changement est maintenue constant au moyen de deux glissières curvilignes qui partent du moyeu de la roue motrice pour aller se fixer au châssis. Un tendeur de chaîne ordinaire de chaque côté de l'axe permet de tendre la chaîne. Les extrémités des glissières curvilignes prennent la forme d’un fer plat et coulissent dans des glissières fixées sur le châssis, de sorte que la roue, dont les oscillations sont amorties par les ressorts à lames, puisse se déplacer de manière guidée dans le sens vertical, tout en maintenant constante la distance de l’axe de la roue, car le rayon de la courbure est égal à la distance entre le pignon du changement et la couronne de la roue (voir la description détaillée plus bas). Les mains des ressorts de la suspension avant sont fixées à l’extérieur des longerons, de sorte que les ressorts se trouvent en dehors du châssis et non pas en dessous des longerons comme c’est habituellement le cas (sur le brevet, seules les mains arrière se trouvent en dehors). Pour profiter pleinement des avantages de cette construction, les ressorts à lames sont montés sous l'essieu et non pas, comme d’habitude, sur l'essieu (pour les autres avantages de cette construction, voir le chapitre "Suspension"). La direction est à volant, ce qui implique l'utilisation d'un boîtier de direction avec amortisseur de chocs, qui toutefois n’est pas indiqué sur les dessins du brevet.
 
Le moteur est un monocylindre classique refroidi à eau dont la circulation se fait par thermosiphon. De chaque côté de la cloison entre le siège passager et le moteur se trouvent deux radiateurs avec un réservoir d'eau commun, situé en charge au-dessus des deux éléments. Les deux boîtes à eau sont reliées entre elles par un long tuyau horizontal, qui est en même temps relié à la culasse par un autre tuyau qui ramène l'eau chaude qui monte dans le cylindre vers les réservoirs d'eau. Un autre tuyau horizontal, dont le raccordement à la boîte à eau inférieure du radiateur gauche est visible sur la photo, relie les éléments de refroidissement des deux côtés de la cloison et achemine l'eau refroidie vers la partie inférieure du cylindre.
Le changement est un réducteur épicycloïdal Bozier à deux vitesses et embrayage à cône. Celui-ci n'est pas monté sur l'axe du moteur, comme c'est habituellement le cas, mais séparé de celui-ci sur le châssis. L'entraînement du moteur se fait par une chaîne vers la boîte de vitesses et une chaîne finale vers la roue arrière. La séparation du moteur et de la boîte de vitesses nécessite l'utilisation de la boîte de vitesses Bozier pour automobiles (datant d'environ 1898), commandée par un levier et une pédale, tandis que sur la version plus récente (1904) pour motocyclettes et tricycles, l'actionnement combiné du frein et de l'embrayage permet de supprimer la pédale en faveur d'un seul levier à main (voir le chapitre “Changements de vitesse” du site Motocyclettes Austral consacré au réducteur Bozier)La raison de cette complication est d’éviter un problème connu de tous les réducteurs montés sur l’axe du moteur : dans ces boîtes, la grande vitesse est toujours en prise directe et le pignon de chaîne tourne à la vitesse de l'arbre moteur. Pour obtenir une démultiplication suffisante, le diamètre de la couronne dentée de la roue arrière doit être très grand et le pignon de sortie de la boîte très petit, ce qui provoque que la chaîne a tendance à monter sur les dents du petit pignon. La commande du réducteur et du frein de stationnement et de secours se fait par des leviers de voiturette placés à droite du conducteur. Le deuxième frein à sangle agit également sur la roue arrière et est actionné par une pédale qui actionne probablement en même temps le débrayage.
 
Il semble que la suspension Protin-Giroux n'ait pas eu une grande diffusion. Le seul fabricant connu ayant réalisé un tricar d’après ce brevet fut Mototri Contal, qui était depuis septembre 1908 sous la direction de Gaston Hamelin. Celui-ci lance en 1910 un modèle C à châssis en acier embouti et suspension intégrale dont l’aspect est presque identique au châssis du tricar Protin et Giroux (ci-dessous).

 
 
 
Le brevet

Cliquez sur les miniatures pour les agrandir.
 
   






Chapitre créé le 19 février 2023
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