Lurquin-Coudert
1ère partie 1889-1904 2ème partie 1905-1907 3ème partie 1908-1910
4ème partie 1911-1912 5ème partie 1913 6ème partie 1914 7ème partie fin
Notre contribution en la matière est un complément qui met l'accent non seulement sur les tricars, mais aussi sur les fondateurs de l'entreprise familiale Lurquin & Coudert.
Les origines de la maison Lurquin-Coudert remontent à l'an 1891. Son fondateur, le mécanicien belge Florimond Joseph Lurquin (ou Leurquin, une variante du nom officiellement reconnue dans les documents) est né à Braine l'Alleud en Belgique le 28 mars 1846. En 1868, il épousa Louise Leclercq (*19 février 1846, Henencourt/Somme) avec laquelle il avait quatre enfants : Flor Louise Eugénie Leclercq, née le 5 avril 1868 à Bruxelles ; Florimond François César Lurquin, né le 9 décembre 1870 à Mollenbeek-Saint-Jean (Belgique) et décédé en 1931 ; Edmond Lurquin, né en 1870 ou 1871 en Belgique, et Marie Adolphine Louise Lurquin, née à Bruxelles le 14 octobre 1876 et décédée à Vincennes le 30 août 1937.
Un changement majeur se produit le 4 décembre 1897, quand la fille cadette de Lurquin, Marie Adolphine Louise, se marie avec Charles Coudert (ci-contre). (Voir l'acte de mariage).Mécanicien de profession et fils d'un limonadier domicilié au 315 de la même rue du faubourg Saint-Antoine, Coudert est né à Paris le 30 janvier 1873 et décédé à Arpajon (Essonne) le 12 décembre 1967. Entre les témoins de mariage on trouve le frère de l'épouse, Edmond Lurquin, qui spécifie "ingénieur" comme profession. Rien d'autre n'est connu concernant sa vie ou sa carrière, à l'exception du fait qu'il a fait breveter une suspension élastique le 9 décembre 1904 conjointement avec son beau-frère Charles Coudert (voir plus loin dans le chapitre). Un autre témoin était l'industriel Victor Besse, le cofondateur de la société La Française Diamant.
Malheureusement, les sources historiques sont muettes concernant la création de la maison Lurquin & Coudert, qui a eu lieu probablement environ 1897. Étant donné que le fils Florimond François César est qualifié de "fabricant de bicyclettes" en 1900, on peut présumer qu'il a repris le secteur du vélo, tandis que Lurquin senior et Charles Coudert ont commencé à construire des motocyclettes. À partir de 1902, les premières motos apparaissent dans la publicité (ci-dessous). Cette même année, une suspension du moteur dans le cadre fut brevetée par Charles Coudert (ci-contre) et deux motocyclettes Lurquin & Coudert, pilotées par Charles Coudert et Edmond Lurquin, participèrent à Deauville. (Voir le brevet intégral). Le sujet de ce brevet est un carter moteur venu de fonte avec une attache qui permet de monter un moteur à explosion en position verticale soit à l'intérieur du cadre d'une bicyclette, soit à l'endroit du pédalier, de sorte que l'attache s'emboîte sur le tube du cadre reliant la fourche au pédalier. Par la suite, le carter coulé d'une seule pièce avec ses attaches de fixation sera typique des moteurs de la marque.

Ce qui est étonnant est le fait que l'on ne parle que de la vente des fonds des bicyclettes. De plus, Charles Coudert continue à appartenir à la maison Lurquin – Coudert jusqu'au printemps 1912 (voir plus loin). Tout aussi remarquable et étonnant est le fait que Coudert présente en 1909, année de la mort de Florimont Joseph (voir plus bas), sous le nom de marque (déposée) C. Coudert une gamme identique à la gamme Lurquin–Coudert des Éts. Lacour & Cie. Le siège de la marque est le domicile de ses beaux-pères au 46, rue de la Prévoyance à Vincennes, où Coudert habite avec sa femme et la veuve de Florimont Joseph. Malheureusement, on ne sait pas non plus qui étaient les associés de la compagnie Lacour & Cie. Est-ce que Charles Coudert et les héritiers de Florimont Lurquin détenaient des parts dans l'entreprise ?

Une particularité aussi des nouveaux moteurs de la marque est la manière de leur fixation dans le cadre au moyen de quatre colliers venus de fonte avec le carter. Le moteur avec ses organes peut donc être facilement enlevé du cadre. L'allumage se fait par une magnéto Bosch blindée et entraînée par une cascade successive de pignons ; le carburateur est un Longuemare. Les pots d'échappement sont munis d'un volet manœuvrable au pied (échappement libre facultatif). Le changement de vitesse est un réducteur épicycloïdal NSU à deux rapports (3:2) et embrayage à cône. À l'origine, le changement NSU était commandé par une manivelle qui a été remplacée par une pédale sur les motos Lurquin-Coudert (ci-dessus, à gauche). La transmission s'effectue par une courroie trapézoïdale.

Le cadre surbaissé de la moto 5 CV ½ est très moderne. La partie inférieure est cintrée en forme d'un V arrondi qui forme un berceau épousant le contour du carter. Il y a deux freins commandés par manettes inversées au guidon; l'un agit par un serrage à double spire sur le moyeu de la roue arrière, l'autre sur la jante de la roue avant. Seule la fourche avant est suspendue et de plus munie de haubans, car cette machine est établie pour le grand tourisme et peut remorquer un side-car.
Louis Émile Train (ci-contre) est né à Saint-Étienne le 22 octobre 1877 comme fils du mécanicien Jean-Baptiste Train et de son épouse Juliette Émilie Claire Hélie. Il a commencé sa carrière comme mécanicien dans les ateliers de son père et, tour à tour, il s'est consacré à la machine à coudre, à la bicyclette, à la motocyclette et à l'automobile. Puis il devient constructeur et pilote d'avions en 1910, mais après un accident traumatisant lors de la course Paris—Madrid le 21 mai 1911, lequel se terminait par la mort du ministre de guerre, Maurice Berteaux, et par trois blessés, sa carrière de pilote touche à sa fin. La commercialisation de monoplans étant difficile, Train reviendra à la motocyclette en faisant l'acquisition de la fabrication des moteurs Lurquin-Coudert en 1914. Après la guerre, à partir de 1918 et jusqu'à 1922, Train produisait uniquement des moteurs dans ses nouvelles installations à Courbevoie, 9 rue Rouget-de-L'Isle, mais plus tard il fabriquait des motocyclettes complètes.Les tricars et tri-voiturettes Lurquin – Coudert
Tricar modèle 1906


Ce châssis de forme rectangulaire est établi en gros tubes d'acier étiré. Deux haubans en avant et en arrière relient ce rectangle au tube de direction et au tube de selle respectivement du cadre moto. Le châssis-tricar ci-dessus est encore muni d'une suspension à ressorts à lames en avant, plus précisément, de ressorts à pincette en C. Mais il est déjà doté d'une suspension à ressort en spirale en arrière, qui sera typique de la marque et qui sera utilisé aussi sur l'avant-train. Elle fut inventée par Edmond Lurquin et Charles Coudert lesquels, le 9 décembre 1904, demandèrent le brevet (Nº 348.734) d'une suspension élastique particulièrement destinée aux motocyclettes. (Ci-contre. Agrandir l'imagette).La description du brevet se rapporte à la suspension d'une roue arrière, mais la disposition peut être appliquée aussi bien pour la suspension de la roue avant.

Au tube B est fixée une tige D qui traverse la pièce A. Elle porte à sa partie supérieure un chapeau E qui y est vissée et assurée avec un contre-écrou e. Un petit ressort amortisseur F est placé entre le chapeau E et le tube A pour éviter que le chapeau bute contre le tube A lors d'une détente soudaine après une forte compression du ressort C. Un réglage de la suspension, dont le débattement semble être faible, n'est pas pourvue dans le brevet.
À l'origine, cette suspension fut conçue pour des motocyclettes d'un poids de 50 kg environ. L'adaption à un lourd tricar Lurquin—Coudert de 250—285 kg (!) requiert l'utilisation d'un ressort beaucoup plus "dur", c'est-à-dire un ressort qui possède un gradient d'environ 25 kg par cm, au lieu de 12 – 14 kg par cm pour la roue arrière d'une moto légère. Afin d'eviter que le tricar saute comme une balle, il fallait donc choisir un ressort ayant un diamètre du fil assez grand et un diamètre des spires faible, ce qui reduit cependant le débattement et le confort, parce que chaque petite irrégularité de la chaussée est transmise au châssis. De plus, il fallait monter un ressort plus long (pour éviter qu'il "talonne" trop vite), adaption qui fut réalisée sur le modèle 1907.
Sur les tricars, ce tube forme la glissière dans laquelle coulisse contre la résistance d'un fort ressort à boudin une pièce cylindrique sur laquelle est fixée à 90º la fusée de la roue. Cette pièce est montée rotative afin qu'elle puisse suivre le mouvement de la direction. Un essieu au sens strict est absent ; c'est la traverse du châssis qui prend en charge cette mission. La barre d'accouplement, qui est disposée devant la traverse, porte une chape ouverte à chaque extrémité. La barre de connexion reliée au tube de direction commande la fusée droite.


Charles Coudert, 10 septembre 1905

Château Thierry 1905
Par rapport au premier modèle, le tricar de 1906 est amelioré à plusieurs égards.



Le tricar de livraison Lurquin & Coudert modèle 1906


Tricar Lurquin-Coudert 1906/1907
Les tricars Lurquin & Coudert 1907

La mécanique est la même qui a propulsé aussi les tricars modèles 1906. Le client avait le choix entre le monocylindre de 4 CV ½ (84 x 90 mm ; 498,5 cm³) et le bicylindre de 6-7 CV (2 x 80 x 80 ; 803,84 cm³), les deux refroidis par eau et dotés d'un "régulateur sur l'échappement" qui est probablement un simple lève-soupape.
Du point de vue esthétique, ce croisement entre tricar et tri-voiturette est peu séduisant, car l'absence de la carrosserie arrière est ressentie comme désagréable. Sur le plan technique, le résultat en est un tricar qui présente les désavantages d'une tri-voiturette – poids et prix élevés – sans en posséder réellement les avantages comme le confort d'assise du conducteur, la protection des projections de l'huile, une direction irréversible, un châssis en tôle d'acier emboutie plus rigide, etc.
La trivoiturette Lurquin & Coudert 1907 – 1910

(agrandir)
La même tri-voiturette, à quelques détails près, figure dans le catalogue 1908 du fournisseur en gros "Nil Supra" (Bara, Pascault & Riga, Fournitures générales pour cycles, automobiles et canots, 35, rue Victor Massé, Paris, IXe).
La tri-voiturette modèle 1907 est muni du même réservoir-refroidisseur formant un cadre que le tricar ci-dessus. Les panneaux latéraux se terminent devant les radiateurs.
Tri-voiturette de Livraison modèle 1907

Tri-voiturette modèle 1908 – 1911



Un couple est sur le point de partir en promenade sur une trivoiturette modèle 1908 — 1911.
Tricar Lurquin & Coudert 1910

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Nous nous arrêtons brièvement sur les voiturettes que nous avons mentionnées plusieurs fois dans le texte précédent, afin de donner une idée des modèles à l'aide desquels Charles Lacour cherchait à établir Lurquin-Coudert aussi dans ce domaine. Cependant, on parlera plus en détail de la voiturette simple et légère de 1911 qui représente une nouvelle tendance générale vers une voiturette simple et bon marché visant la clientèle du tricar. Ce modèle fut probablement conçue comme le successeur contemporain de la tri-voiturette Lurquin—Coudert qui était en fin de série en 1911.
Voiturette Torpédo – Sport
Cette voiturette appartient à une classe de véhicules très légères à trois ou quatre roues. Très influencé par les légères voiturettes anglaises à trois ou quatre roues, ce type de voiturette donnera naissance à une nouvelle classe dénommée "cyclecars". Carrossée comme une "vraie" voiturette, il s'agit néanmoins d'un engin plus rudimentaire sur le plan technique. Pour des raisons de simplicité, la direction est souvent à essieu pivotant et la transmission à courroies et poulies extensibles remplace la transmission par boîte de vitesses, arbre à cardan et différentiel des "vraies" voiturettes sur ces voiturettes légères à quatre roues.

La voiturette Lurquin–Coudert fut également commercialisée par Charles Coudert sous sa marque "C. Coudert", Vincennes. Elle est carrossée en torpédo sport à deux baquets capitonnés, coussins à renverse, et porte latérale à gauche. À l'arrière se trouve un petit coffre pour l'outillage nécessaire. La vitesse max. est de 55 km/h, la vitesse moyenne est de l'ordre de 40 km/h. Le poids en ordre de marche est de 300 kg.

La "suspension" avant assez rudimentaire est assurée par un simple ressort à boudin (ci-dessus, flèche) et le coulissage du pivot de la cheville ouvrière dans son guide, à l'instar de la voiturette Bédélia (ci-dessous, à droite).


Le moteur est un bicylindre en V à soupapes d'admission automatiques qui développe une puissance de 9 HP. Les cylindres sont inclinés à 45º; la cylindrée est de 1107,8 cm³ (2 x 84 x 100 mm). Une pompe au pied assure le graissage. Le carburateur peut être un Longuemare ou un Claudel, l'allumage se fait par magnéto Bosch haute tension ou à accumulateur (en option).La voiturette 8 HP/10 HP 1908



La voiturette 1910
Également carrossée en tonneau 4 places, cette voiturette est munie au choix d'un moteur à 4 cylindres de 10, 12 ou 14 HP.

La voiturette de livraison 1911
Conjointement avec la voiturette Torpedo-Sport a apparu une voiturette de livraison légère qui était apparemment destinée à remplacer la trivoiturette de livraison. Beaucoup moins cher que les voiturettes 1908—1910, ce modèle se signale pourtant par des solutions techniques moins simples par rapport à la voiturette torpedo-sport. Au lieu d'une transmission par courroie et poulies extensibles, elle est munie d'un réducteur Bozier à deux rapports et d'une transmission à cardan par pignon d'angle. De plus, elle dispose d'une marche arrière indépendante du changement Bozier. Le châssis en tôle emboutie est suspendu par des ressorts semi-elliptiques, les roues sont à rayons comme sur la trivoiturette, la direction à vis sans fin est irréversible. Deux motorisations étaient disponibles : un monocylindre de 5 ¾ HP (84 x 120 mm, soit 665 cm³) et le bicylindre de 6-7 HP équipant aussi les tricars (contre un supplément de 150 frs.).


Chapitre créé le 24 janvier 2019


